Savoir naviguer avec du courant et plus particulièrement
dans les petits courants
Environnement :
La gestion des courants sera présentée dans un contexte
d’eau-vive en rivière. Au fur à mesure les grands courants marins tels que ceux
rencontrés pour les traversés vers une île seront abordés.
Pour naviguer dans le courant cela nécessite de connaître cet environnement.
On pourra se reporter au chapitre concernant la connaissance du courant et ses
résonances.
Prendre le courant.
Environnement :
Aller naviguer dans le courant à partir du contre-courant
s’appelle faire une reprise de courant ou, pour les intimes, faire une reprise.
Modes opératoires :
En remontant le contre courant, il faut orienter le bateau
vers le courant avec de la vitesse. On entre dans le courant avec un angle par
rapport à son axe choisi entre la perpendiculaire et presque face au courant. Quand
le bateau est à cheval entre le contre-courant et le courant, il va tourner
avec le courant qui pousse sur la partie avant. Ce virage, qui est un dérapage
accéléré par le courant, est un peu vif et renversant vers l’extérieur du
virage. Il faut donc bloquer la coque au niveau du roulis. Soit elle est gardée
presque à plat comme un pro, soit elle est gîtée à l’intérieur du virage pour
plus de sécurité. observation :
Le blocage du bateau est plus aisé si les épaules sont
dirigées dans la direction vers laquelle on veut aller et non dans l’axe du
bateau. Équivalent du « planter de bâton » cher au skieur, l’appui
de ré équilibration ou propulsif pourra être préparé au cas où...
Observation :
Dans le cas où la vitesse et l’angle de pénétration dans le courant ne sont pas
suffisants, un refus risque de se présenter. La navigation se fera alors dans
les tourments des marmites de la zone de cisaillement, ça colle et c’est très désagréable !
Variables : Si
une bascule du poids est engagée sur l’arrière du kayak, le virage est plus
lent et la courbe plus grande. C’est une reprise de courant longue, car
l’étrave qui est moins mouillée, entre dans le courant plus tard et lui
présente une surface inférieure. En plus la bascule arrière permet au bateau de
passer plus facilement l’espace tumultueux de la zone de cisaillement. Si des
tractions arrière ou des appels tractés arrière sont placés à l’intérieur du virage
et sont combinés au pagayage, la trajectoire sera encore plus grande.
Inversement, un tassement avant fera réagir le bateau très
tôt. Alors la reprise sera courte.
Variables : Dans le cas où le courant est très
fort et étroit et comprend des vagues pyramidales, ou le bateau est chargé ou
très directeur ou très instable, il est possible tourner dans le contre-courant
puis de le descendre au bord de la ligne de cisaillement. L’entrée dans le
courant se fera alors à l’aval de la veine d’eau généralement moins violente, mais
les refus sont très fréquents et ça ne glisse pas. La navigation se finira sur
les nappes et un gros effort risque
d’être nécessaire pour rejoindre le courant avec une traction arrière, un appel
tracté arrière à l’extérieur permettant à l’avant du bateau d’entrer dans le
courant.
Dans le cas où la veine d’eau est large, il sera envisageable
d’entrer avec un angle faible et beaucoup de vitesse, comme pour remonter du
courant et d’engager le dérapage une fois que le bateau est en vitesse 0.
Remarque : Si dans le courant il y a des vagues, il faut
engager le dérapage avec l’avant sur la face descendante d’une vague et le
milieu du bateau dans le creux. Sinon des déséquilibres et des refus peuvent
bien apparaître.
Remarque : En mer c’est comme sur les rivières
d’eau vive à gros débit d’eau, les zones de cisaillement sont si tumultueuses
qu’elles contrarient le projet de les traverser. Une bascule arrière peut alors
éviter les boussoles (demi-tour involontaire). Une fois que vous êtes dans le courant,
il faut surveiller la navigation car ce courant (courant réel) qui s’associe la
vitesse du bateau (courant relatif) va vous faire arriver très vite (courant
apparent) sur les obstacles.
Descendre avec le courant
Observations :
Souvent le courant est dévié par un obstacle, sous réserve
d’avoir suffisamment de vitesse, le bateau va suivre les filets d’eau qui
contournent cet obstacle. Il faudra avoir une conduite assez franche et pas
hésitante, et être plutôt en bascule avant pour bien les suivre.
S’il y a des vagues alors le pagayeur synchronisera son rythme
pour planter la pagaie dans le sommet des vagues.
Dans le cas ou la zone de navigation présente des frictions ou
constrictions, il faudra choisir de passer plutôt à l’économie (pas dans le
plus fort). Si le choix est fait de passer dedans, il faut plutôt privilégier
les franchissements francs et vigoureux.
Quitter le courant pour se stationner sur le bord :
Environnement :
Les kayakistes le désignent par « stop
contre-courant » et par les intimes par « stop ». Il faudra
commencer par repérer une zone d’arrêt dégagée en aval, de préférence dans un
contre-courant, pour préparer ces enchaînements.
Mode opératoire :
On se dirige vers le contre-courant avec de la vitesse, plus
l’angle d’entrée est faible, plus le dérapage sera long et facile à équilibrer
pour les débutants. Une entrée en travers va construire un dérapage
potentiellement violent. Il est déconseillé quand le bateau est chargé.
En restant sur l’arrière du bateau il est possible de rentrer
dans le contre-courant sans être trop bousculé mais il faut de la place. Une
inclinaison intérieure ou un blocage de la coque sera indispensable.
Remarque : Le stop contre-courant est fini quand le
bateau est sur l’axe des filets d’eau, c’est à dire l’avant face à l’amont. C’est
aussi la position qui permet au bateau de repartir en reprise de courant.
Par conséquent dans le cadre d’un embarquement fait sur un
contre-courant le bateau doit être posé dans l’eau l’avant vers l’amont du
courant principal.
Remarques :
Dans le cas où un groupe fait le choix de se stopper dans le
même contre, il faudra que chacun libère la zone de dérapage le plus vite
possible pour les suivants. Pour ce
faire, le plus simple est de partir en marche arrière au fond du contre dès que
le stop est terminé. Ce comportement doit être systématique et doit être
inscrit dans le code de pratique du kayakiste à la rubrique « je fais
attention au autres », « je les laisse se mettre en situation sécurisée »
et « je fais en sorte de ne pas leur compliquer la tache ». Une seule
personne peut se situer dans la zone de dérapage et c’est celui qui offre ces
services pour la sécurisation de la situation.
Quand le groupe respecte des règles de conduites apprises
précédemment cela permet à chacun de naviguer en toute confiance. Ces
conventions de vivre ensemble sur l’eau doivent être expliquées au débutant dès
les premières séances. Leur respect permet
la longévité des groupes, la confusion amène la crainte et l’abandon.
S’il est possible de se tenir les uns aux autres, il ne faut
pas le faire trop près du courant pour éviter le départ accidentel des plus
exposés. Puisqu’il faut toujours rester manœuvrant, rester trop près de
quelqu’un peut aussi gêner le coup de pagaie indispensable voire le prendre sur
le nez.
Si les courants sont très violents, on pourra faire demi-tour
dans le courant sans chercher à s’arrêter, puis rejoindre le contre-courant en
bac, c’est à dire en pagayant face à l’amont avec un faible angle en direction
du contre courant. On dit que l’on fait un stop courant suivi d’un bac (voir
article suivant). Cette manoeuvre très sûre est longue, il faut donc
l’anticiper énormément par rapport au point d’arrêt.
Dans ce cas, il vaut mieux être en assiette arrière, à plat
sur l’eau et avoir de la vitesse avec un travail sur l’arrière du bateau (voir
traversée de courant). Cette procédure peut être mise en place dans la mesure
où la veine à traverser est large.
Pour traverser un courant
Tel qu’il est très
souvent présenté, le principe du bac est une traversée de courant sans se
laisser entraîner en aval.
Mode Opératoire :
Cette figure suppose que le bateau a pris de la vitesse dans le
contre-courant et que l’angle d’entrée du bateau dans le courant a été bien
choisi. Celui-ci est conservé tout au long de la traversée. De plus une gîte avale
du bateau peut être nécessaire tout au
long de la traversée tandis qu’une inversion de gîte sera nécessaire dans le
contre-courant à l’arrivée.
Traversée de courant en mer
Les courants marins
posent des problèmes spécifiques car ils peuvent être très longs et très
larges.
Si le groupe est important, il est préférable de ne pas
s’engager tous en même temps car les erreurs de trajectoire peuvent complètement
disperser le groupe, surtout en cas de dessalage.
Suivant la force et la
largeur de la zone de courant, il peut être totalement irréaliste de vouloir
traverser sans dériver vers l’aval, se pose alors un vrai problème de
navigation. Il faudra s’engager dans le courant suffisamment en amont de
l’objectif pour être sûr de ne pas le rater. Ce n’est pas une manie de puriste.
Si votre objectif est l’île de Sein, le courant s’appelle le raz de Sein et
peut vous emmener très loin de l’île. Une arrivée triomphale en canot SNSM
risque de vous coûter cher en apéros au bistrot du port.
Exemple de traversée de courant sur des grandes distances
et sur des courants modérés (2 nœuds maximums) Il est possible
d’utiliser la technique des alignements bretons. J’adopte au départ une
correction arbitraire qui m’amène à viser un peu en amont de mon objectif. Si
j’arrive, en tenant ce cap au compas, à me maintenir sur l’alignement choisi au
départ entre mon objectif et un point de l’horizon, c’est que ma trajectoire
est rectiligne. Cela suppose que je sois capable d’étaler (c’est à dire
contrer suffisamment le courant pour pouvoir naviguer comme si j’étais à
l’étal) un courant de 2 noeuds maximum à la pagaie sur des distances
importantes. Si je ne dispose d’aucun alignement, la méthode reste bonne, mais
je dois vérifier en permanence que le cap vrai de mon objectif est constant.
Dans ce cas, avoir un compas de relèvement dans la poche peut s’avérer
pratique. Avec un peu d’expérience, on « sent » très bien la dérive
et les mesures deviennent superflues... Tant que la visibilité est bonne !
Remarque cette technique de navigation à la boussole,
qui ne demande pas de gros moyens techniques, financiers, d’encombrement est
évidement limitante. Ce n’est pas la façon de faire aujourd’hui pour une
navigation fiable quand les conditions de sécurités sont douteuses.
Dans le cas où le courant est plus fort, de 2 à 6 nœuds.
Si vous envisagez
d’affronter de tels courants sur des distances significatives ; il est
indispensable de connaître les horaires et les coefficients de marée,
l’orientation et la vitesse des courants en fonction de la marée indiquées
sur les cartes marine ou mieux sur les livres de courants côtiers publiés par
le SHOM.
Dans ce cas, il est inutile d’espérer ne pas
dériver. Il faut donc se donner de la marge en remontant suffisamment en amont
le long du courant avant de s’y engager ou attendre que le courant faiblisse.
La solution viendra plus facilement d’une journée bien organisée que d’un
calcul savant. Envisager la traversée de l’entrée de la rade de Brest à
mi-marée par un coefficient de 120 est un beau défi mais il ne faut pas oublier
que 2 heures et demi plus tard, ce serait beaucoup plus facile.
Cela dit, en se
laissant une bonne marge de dérive, la méthode de l’alignement breton marche
aussi dans un courant fort. Il est bon d’avoir quelques ordres de grandeurs en
tête.
Si vous pagayez à 4
noeuds face à un courant de 4 noeuds, vous êtes immobile.
Si vous pagayez à 4
noeuds au travers d’un courant de 4 noeuds, vous mettez le même temps à le
traverser que s’il n’y avait pas de courant mais votre dérive est égale à la
largeur de la traversée.
Si vous pagayez à 4
noeuds à 45° d’un courant de 4 noeuds, vous mettez 1,414 fois plus de temps à
le traverser mais vous arrivez en face.
En chemin, il ne faudra pas oublier que l’angle des filets
d’eau n’est pas orienté exactement de la même façon sur toute la largeur du
courant et que la vitesse du courant varie aussi en fonction du lieu et du
temps qui passe. Il faudra affiner un peu sa correction pour garder le
cap.
Enfin et surtout, n’oubliez
pas que le vent, beaucoup moins prévisible, se chargera de détruire le plan de
navigation le mieux préparé.
Plus les distances sont grandes plus les erreurs d’angle sont
pénalisantes. Il est possible d’envisager de naviguer avec un GPS, cela peut
aider une navigation matinale dans le brouillard !
Naviguer dans une zone de Cisaillement
Modes opératoires :
Avant de passer dessus il faut l’observer quelques instants
afin de déterminer les risques et l’engagement. Les mouvements principaux, leurs
fréquences, leurs caractères excessifs ou paisibles seront les premiers
critères.
Le second point sera de déterminer s’il y a des lignes de
fictions entre les nappes et les marmites favorables à notre route. Traverser
des nappes risque de nous faire tourner en bourrique en nous déviant par-ci
par-là. Le mieux, c’est déjà de se mettre en bascule arrière en conservant une
vitesse franche pour éviter que la pointe du bateau soit prise dans un
mouvement d’eau.
La traversée des nappes va accélérer ou ralentir la
progression. Pour conserver une trajectoire à peu près droite il faudra contrer
les effets par une ou plusieurs tractions en sens inverse de la poussée de la
nappe.
Remarque : Eau dure et eau molle s’enchevêtrent,
une attention particulière sur les accrochages sera de mise.
La traversée de courant en « lettre à la poste » :
Environnement : Avec un groupe peu technique ou peu
entraîné ou si le courant fait plus de 6 nœuds ce qui est rare, il reste le principe
de la lettre à la poste.
Mode opératoire : On appelle lettre à la poste la
traversée d’un courant en enchaînant directement une reprise de courant et un
stop contre-courant. Plus le courant est large, plus la reprise devra être
longue, réalisée avec un minimum d’actions et un maximum de vitesse. Pour
franchir la veine d’eau sans trop de risque, il vaut mieux anticiper sur sa
force en remontant le plus haut possible dans le contre avant d’engager la
reprise. Ensuite, il faut s’approcher de
la zone de cisaillement et la franchir en se laissant descendre jusqu’à rentrer
dans le courant. Avec de l’expérience, on peut aller chercher le courant au
dessus de la zone de formation du contre-courant. On y trouvera souvent une
« marche » de quelques cm à franchir avec beaucoup d’élan et qui
donne accès directement à la zone de courant lisse en forme de V dans laquelle
la traversée se fera en glisse totale et sans manoeuvre.
Une fois engagé dans le courant il ne faut pas attendre pour
rejoindre le contre-courant dans lequel on projette de s’arrêter. Il faut
pagayer en travers dans le courant vers la zone de cisaillement opposée à celle
qui vient d’être franchie afin de minimiser la dérive dans le courant.
L’entrée dans le contre courant peut être brutale s’il est
violent ou perturbé. On se protège des aléas grâce à une gîte amont contenue.
Pour sécuriser complètement, on peut réaliser un stop dans le courant pour se trouver face à
l’amont et finir en bac dans la zone de cisaillement .
Comme précédemment il faut tout faire en assiette arrière et
avec ou sans gîte. Dans tous les cas, le bateau est bien bloqué dans la
position choisie.
Cette trajectoire en « S » peut nécessiter une
centaine de mètre entre le départ et l’arrivée.
Naviguer contre le courant,
Environnement : S’il est supérieur à 3 ou 4 nœuds,
ce n’est pas vraiment une bonne idée, à moins que ce ne soit juste pour le jeu.
Le mieux est de se poser sur une plage et attendre la renverse de la marée. Bon!
Parfois il n’y a pas le choix.
S’il y a des obstacles dans le courant, îlots, bouées, bateaux
au mouillage, on trouvera derrière des contres courants qui feront office
d’ascenseurs, on peut également longer le bords car il y a des turbulences dues
aux reliefs immergés qui cassent la vitesse du courant.
Si la rive est proche, on peut débarquer et marcher en
traînant son kayak sur l’eau.
Courant de rivière, courant d’air et courant de mer
Pour naviguer dans le vent et le courant, avoir un gros
ordinateur ne suffirait pas car le vent et le courant changent de force et
d’angle à chaque instant. Certaines informations globales nous donnent une idée
de ce qu’il est possible de faire mais il faut réajuster le projet au fur et à
mesure.
Il n’y a pas de techniques spécifiques à l’association vent +
courant, comme pour naviguer dans les vagues et le vent, on puisera dans son
répertoire technique pour tracer et suivre sa route en mode essai - erreur .
Rassurons-nous, avec l’expérience de multiples stratégies plus
ou moins conscientes, chacun développe un pifomètre efficace. Mais restons
humbles devant la nature car la mer reste
le royaume de l’imprévu.
Naviguer dans le courant avec des objets de signalisation
ou des bateaux au mouillage.
Environnement :
Ce sont des obstacles parfois dangereux pour le kayakiste emmené
dans le courant et le vent. Si presque tous les coups sont permis quand
on contrôle sa navigation, il vaut mieux anticiper sur les éventuels
risques qui peuvent être rencontrés. En effet, ces derniers naissent le plus
souvent lorsque le contrôle est perdu ou quand on n’est pas attentif !
Modes opératoires : Le mieux est de passer en
aval, c’est à dire derrière l’obstacle par rapport au courant et/ou sous le
vent de l’obstacle.
Pour passer entre deux obstacles, rester bien au milieu si le
courant est perpendiculaire à cette « porte », typiquement des piles
de pont au dessus d’une rivière. S’ils sont décalés, autrement dit si le
courant fait un angle important par rapport à la porte, il vaut mieux passer
près de celui qui est en amont, afin de réserver une marge de manoeuvre plus
importante avec celui du dessous. En effet, les risques de dérive dans sa
direction sont forts.
Dans le cas des bateaux aux mouillages, il faut passer en aval
ou loin en amont, car leur bouée et leur cordage sont des mailles de filet
souvent trop petites pour y passer.
Dans le cas où un groupe de plus de trois bateaux doit
traverser un port de mouillage, il est préférable de faire des sous-groupes
même si on navigue ensemble.
Remarque : Il n’est pas toujours autorisé de
naviguer dans ces bassins.
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